mercredi 27 juin 2012

Rencontre au sommet (2e partie)

          « Soudainement, il était là, devant moi :
Amir Khadir, Leader Suprême et Guide Éternel
de la République populaire du Kébékistan. »

Jospeh Facal, Le maître du monde



Pierre Karl – Voici BAHAMUT, la Base Aérienne Habitée, Armée et Mobile pour une Uniformisation Totale de l'information. Bon, le nom reste à travailler, mais c'est quand même impressionnant, non! Quand nous l'aurons bâtie, le Québec ne sera jamais plus le même. Tout le monde voudra nous imiter. Laisse-moi t'expliquer de quoi il s'agit en essayant un peu de faire comme toi, en posant les questions qui font mal. Selon toi, Richard, pourquoi ne paraissons-nous pas aussi objectifs que nous devrions l'être?

Richard (qui a réponse à tout mais sait rester modeste) – Voyons Pierre Karl! Parce que nous sommes trop près des gens, c'est évident!

Pierre Karl – Exactement, Richard, exactement. Mais avec BAHAMUT, nous résoudrons définitivement ce problème. Tous les cadres et employés de tous nos médias, tous nos journalistes, écrivains et penseurs, tous nos artistes, artisans et techniciens, toutes nos personnalités devront vivre sur la base aérienne et éviter tout contact non professionnel avec les gens de la surface. Nous aurons tout ce qu'il faut pour assurer à tous une vie épanouissante et luxueuse : des écoles, des parcs et des hôpitaux Québecor™, des épiceries et des pharmacies Québecor™, des restaurants et des centres d'achat Québecor™. Il y aura même une Université Québecor™, avec un pavillon Bock-Côté™ des sciences sociales, un pavillon Facal™ d'économie et de politique, un pavillon Salvail™ d'histoire québécoise, un pavi…

Richard (qui ne demande rien d'autre que sa juste part) – Et mon pavillon à moi?

Pierre Karl – Toi, Richard, tu seras au centre de toute l'opération, ne t'inquiète surtout pas.Toujours est-il qu'en créant une distance objective entre nous et le peuple, nous parviendrons à atteindre un degré d'objectivité inégalé. Notre sympathie pour les gens ordinaires ne nous empêchera plus jamais de dire les choses comme elles sont. C'est extraordinaire, non? Avec un esprit aussi aiguisé que le tien, tu dois quand même te demander pourquoi il est nécessaire d'investir des milliers de milliards de dollars pour construire une aussi vaste base aérienne, alors qu'il serait possible de nous isoler plus facilement en achetant pour beaucoup moins cher Rivière-des-Prairies ou Pointe-aux-Trembles.

Richard (qui pose toujours les vraies questions) – Oui, Pierre Karl, pourquoi est-il nécessaire d'investir autant d'argent pour construire une aussi vaste base aérienne, alors qu'il serait possible de nous isoler plus facilement en achetant pour beaucoup moins cher Rivière-des-Prairies ou Pointe-aux-Trembles?

Pierre Karl - Laisse-moi te répondre par une autre question. Selon toi, Richard, quel est le meilleur critère pour évaluer l'objectivité d'un média?

Richard (à qui on ne peut pas en passer facilement) – C'est une question piège. Il n'y a pas de meilleur critère puisqu'il n'y a qu'un seul critère : l'estimation des participants dans une manifestation. Plus on en compte, plus on est biaisé. Moins on en compte, moins on est biaisé.

Pierre Karl – Bravo Richard, c'est vrai qu'on ne peut pas t'en passer facilement. C'est de là que m'est venue l'idée d'une base aérienne mobile. Nous ne pouvons plus nous fier uniquement sur l'équipage de l'hélicoptère TVA™ pour faire tous les calculs compliqués nécessaires à ce genre d'estimation. Toutes les opérations de notre entreprise devront se faire dans le ciel, de façon à nous donner une perspective objective globale sur tous les évènements importants. Notre base sera pourvue de moteurs à réaction lui permettant de se promener partout à travers le Québec. Notre équipe de scientifiques, dirigée par Docteur House™, estime qu'il sera possible de se rendre de Gatineau à Gaspé en moins d'une heure. Qu'il s'agisse d'évaluer les dommages causés par une crue des eaux sur le Richelieu ou la longueur des files d'attentes dans les urgences des hôpitaux montréalais, nous serons là où le Québec veut que nous soyons.

Richard (avec un sens pratique étonnant pour un intellectuel) – Mais Pierre Karl, nous ne pourrons pas évaluer la longueur des files d'attente dans les hôpitaux. Nous ne pouvons quand même pas voir à travers les toits?!?

Pierre Karl – Tu penses à tout, Richard… Mais moi aussi j'ai pensé à tout. La base aérienne sera armée de lasers et de lance-roquettes qui assureront le maintien de l'objectivité même dans les conditions les plus difficiles. Si le toit d'un hôpital nuit à l'objectivité journalistique, le toit sera éliminé. Si des témoins se contredisent, l'un d'eux sera éliminé. Si quelqu'un contredit notre version des faits, il sera éliminé. Si des manifestants se révèlent plus nombreux que nos estimations, ils seront éliminés.  Tous les obstacles seront éliminés. (Il rit de façon diabolique) Mwa HA! HA! HA! HA!

Richard (pantois) – Mais c'est immoral! Pire encore, c'est illégal! Jean Charest n'acceptera jamais cela! La majorité silencieuse n'acceptera jamais cela!

Pierre Karl – Elle l'acceptera, comme tout ce que nous lui demanderons. Et elle l'acceptera grâce à toi, Richard. Tu sais à quel point les gens te font confiance... Tu seras notre porte-parole. (Il pointe du doigt une partie du plan de BAHAMUT) Vois-tu la face inférieure de notre future base aérienne ? Ce sera en fait un immense écran HD sur lequel nous projetterons en permanence ton visage à tous les Québécois. Tu seras le nouveau visage de l'information au Québec, le visage géant, radieux et génial d'un monde révolutionnaire. Partout à travers le Québec, les gens pourront entendre tes opinions 24 heures sur 24. Nos ennemis ne pourront plus te résister. Ils se disperseront quand tu déclareras leurs rassemblements illégaux, ils enseigneront quand tu leur demanderas d'enseigner, ils t'obéiront quand tu leur demanderas de penser...

Richard (dont l'indomptable coiffure exprime toute la bravoure, tout l'héroïsme d'un libérateur de peuples) – Êtes-vous rendu fou? Êtes-vous tous rendus fous??? Depuis ce printemps, partout ou mon regard se pose, je ne vois que démence, divagation et égarement. Avez-vous déjà lu 1984 de George Orwell? C'est ça que vous voulez?!?! Je ne suis pas votre pion! Je ne serai pas votre Big Brother. Je suis comme la majorité des citoyens, je défends la raison. Je vais continuer à la défendre envers et contre vous. Je quitte Québecor™. C'est final! Voyons comment vous parviendrez à réaliser votre plan totalitaire sans moi…

Pierre Karl – C'est dommage Richard, nous formions une belle équipe. Tu vas nous manquer à TVA™ et au Journal de Montréal™.Ce sera difficile. Je sais que pour toi, ce n'est pas l'argent qui compte, mais l'estime des Québécois pour ton intelligence. Dis-toi qu'il te restera toujours Télé-Québec… J'oubliais… Avant que tu partes, Richard, tu comprends que ce que nous venons de discuter est confidentiel, que nous avons les moyens d'éliminer quiconque gênera nos plans. (Richard s'en va en hochant tristement la tête. Pierre Karl prend son téléphone cellulaire et compose un numéro de téléphone que je n'ai pas le droit de retranscrire ici. Après quelques secondes, il prend la parole.) Oui, Julie, c'est moi. [...] Non, non, ne t'en fais pas, tout s'est passé comme prévu. Cette fois, c'est la bonne, ne t'en fais pas. Nous n'allons plus entendre parler de lui avant longtemps.    

Si vous aimez, partagez...

lundi 25 juin 2012

Rencontre au sommet (1ère partie)

                                           « Toute ressemblance avec des personnes 
ou des situations existantes ou ayant existé 
ne saurait être que fortuite. »

Lu dans un quotidien d'ici ?
(cité de mémoire…)

Pierre Karl – Salut mon cher Richard. Ça fait vraiment trop longtemps qu'on s'est parlé toi puis moi. Plus on est important, moins on a de temps malheureusement. Comment vas-tu? Comment va Sophie? Prendrais-tu un scotch? Veux-tu t'asseoir?

Richard (en s'asseyant de façon nettement, mais subtilement réfléchie) –  Euh, oui, ça va bien, Sophie aussi, un peu moins ces temps-ci, vous devinez… Pour le scotch, c'est un peu tôt, non? Avec des responsabilités comme les miennes, il faut rester lucide toute la journée. Et il fait beaucoup trop chaud de toute façon. Peut-être une sangria légère?

Pierre Karl – Je suis désolé, Richard. Afin de respecter davantage un lectorat grâce à toi de plus en plus critique et averti, nos cadres et nos employés ne pourront plus boire de sangria, ni au travail ni à la maison. Le mémo devrait circuler demain. Je sais que c'est injuste, que nous travaillons fort et que nous, au moins, nous méritons ce qu'il y a de mieux, mais que veux-tu?

Richard (plissant les yeux et hochant délicatement la tête afin d'exprimer un point de vue nuancé) – Je comprends, comme toujours je comprends. Une bière alors?

Pierre Karl (à l'interphone) – Deux bières, Lucie, bien fraîches. (Il écoute). Non Lucie, pas celle des employés, voyons! Je suis avec Richard! Amène celle de John, la bonne, tu sais laquelle.

Richard (le regard empreint d'une fine empathie) – Et vous, Pierre Karl, ça va? Julie aussi?

Pierre Karl – Richard, Richard… tu sais que tu peux me tutoyer, voyons. Je ne veux pas que tu me voies comme un patron, après tout ce qu'on a vécu ensemble, après toute la loyauté dont tu as fait preuve pour sauver mon entreprise la plus importante du Québec. Tu es un véritable partenaire.

Richard (avec un ton très perspicace) –  Oui, je sais, merci. Et toi, et Julie, ça va?

Pierre Karl – Oui, oui, ça va… mais nous avons un grave problème à résoudre. Je crois que j'ai la solution, mais j'aurais besoin de ton conseil, de ton point de vue critique. Tous les membres du CA se sont montrés enthousiastes, mais il n'y en a aucun qui a ta colonne vertébrale, ta franchise, il n'y a personne qui est capable comme toi de dire aux gens la vérité en pleine face, aussi dure soit-elle.

Richard (ironique, mais sans contribuer au cynisme ambiant) – Je sais. J'en reçois la preuve tous les jours dans la rue ou chez moi, même qu'hier…

Pierre Karl – Laisse l'histoire faire son travail. Il y aura toujours des jaloux et des frustrés. Dans le journalisme, on ne devient pas un René ou un Denis Lévesque sans créer de remous. Tu peux être fier de relever chaque jour les exigences d'un métier aussi noble.

Richard (comme toujours très pénétrant) –  C'est important de se savoir compris, Pierre Karl. C'est pour ça que j'écris autant. Je vais essayer d'être aussi franc que possible, alors. Quel est le problème?

Pierre Karl – C'est un problème de perception, tu  vois...

Lucie (qui entre en portant sur un cabaret deux bocks bien froids pleins d'une bière à l'apparence épatante et dispendieuse) – Voici vos bières messieurs. Deux Molson Achiever. Comme je vous envie! Il paraît qu'on n'en brasse que deux caisses par année. Est-ce qu'elle est aussi bonne qu'on dit?

Pierre Karl (pendant que Lucie dépose le cabaret sur son bureau) – Tu ne ferais pas la différence, Lucie. Ça goûte… comment dire? C'est le goût de la réussite!

Lucie (en riant) – Vous avez donc raison!

Richard (profond et lumineux) – Comme le disait Bernard-Henri Lévy, ou bien c'était Jacques Attali, la réussite n'a-t-elle pas toujours raison?

Lucie (toute émue d'en apprendre davantage chaque jour) – Vous avez donc raison!

Pierre Karl – Bon, Lucie, Richard et moi discutons de choses graves.

Richard (se filmant avec intelligence à l'aide de son iPhone) – Je m'appelle Richard Martineau et je bois de la Molson Achiever. (Il prend un air encore plus doué). Hum, hum. Je m'appelle Richard Martineau et je bois de la Molson Achiever. Oui. C'est mieux, c'est beaucoup mieux. Les gens doivent connaître la vérité.

Pierre Karl – Oui, bon, mais pour ton nom de famille, je ne suis pas certain que tu avais le droit de l'employer. Je veux dire sans ma permission. Mais ce n'est pas important, on en reparlera plus tard, l'heure est grave.

Richard (préoccupé d'abord et avant tout par l'intérêt public) – Qu'arrive-t-il ? Et surtout comment puis-je ignorer ce qui arrive? Mes informateurs fiables et mes recherchistes rigoureux ne m'ont pourtant rien dit.

Pierre Karl – C'est resté secret. Ultra secret. Mais c'est en train de fuir. Nous avons un problème d'image. On a porté contre notre journal de sérieuses accusations. Assez sérieuses pour qu'il soit rendu nécessaire d'agir. On dit que nous manquons d'objectivité.

Richard (qui n'a pourtant pas peur des mots) –  …

Pierre Karl – Je sais, je sais, cela semble impossible. Mais c'est ce qu'on dit.

Richard (avec une surprenante lucidité même pour un homme visant habituellement aussi juste) – …

Pierre Karl – Je sais, c'est répugnant, c'est indigne même d'être considéré, mais que veux-tu, il faut agir quand même. C'est pourquoi j'ai élaboré un plan. Un projet innovateur, synergique et convergent. Ce n'est pas pour me vanter, mais je crois qu'une fois ce projet accompli, non seulement notre journal atteindra un niveau d'objectivité supérieur à tout ce qu'a connu le journalisme, ça dépassera même tout ce qui a pu être atteint dans l'histoire de l'humanité.

Richard (en véritable Franc Tireur) – Est-ce qu'un seul homme peut dépasser toute l'humanité ?

Pierre Karl – Nous ne sommes pas ici pour faire de la philosophie, Richard, c'est sérieux.

Richard (incapable de fausse modestie) - Je sais bien Pierre Karl, un cerveau comme le mien, c'est parfois difficile à arrêter. Mais il y a des avantages. Par exemple, je suis capable d'écouter les autres parler tout en m'écoutant penser. (Long silence). Et quand je t'écoute, je pense au projet JAMBON que j'ai élaboré en convergence avec tous vos médias depuis quelques années. Ça n'était pas suffisant ?
 
Pierre Karl - Le projet pour un Journalisme Articulé, Multidimensionnel, Brillant, Objectif et Nuancé? Tu en as réussi l'implantation au-delà de toutes les attentes, évidemment, mais c'est déjà dépassé, il faut aller beaucoup plus loin désormais. (Il déroule sur son bureau des plans architecturaux complexes). Laisse-moi te présenter le projet BAHAMUT.

mercredi 20 juin 2012

Vu de la Terre, le ciel est mégalomane


J'ai vu l'affiche du récent film de Guy Laliberté, Toucher le ciel. Je ne suis pas allé le voir et je n'irai pas le voir. Lorsqu'il sera disponible au club vidéo, je n'en louerai pas une copie. Lorsqu'il jouera gratuitement un dimanche soir sur l'une des chaînes de Radio-Canada, même si je suis trop fatigué pour écrire, cuisiner ou faire l'amour, même si je tiens absolument à ne rien faire d'autre qu'écouter la télévision, et même s'il n'y a rien de mieux qu'un hommage TVA au courage et à la détermination des femmes d'Occupation Double, je n'écouterai pas Toucher le ciel. Le film est peut être réussi, je l'ignore et ne m'en remets pas aux critiques déçus. Les images sont probablement saisissantes et le message est très certainement édifiant. Mais je n'aime pas ne pas aimer les gens et je crains qu'après ce film, j'aimerai moins Guy Laliberté. En fait je l'aime déjà un peu moins depuis que j'ai vu l'affiche.


Toucher le ciel - Le voyage d'un rêveur
Source : cinoche.com
« L'expérience unique de Guy Laliberté dans l'espace » serait « le rêve d'une génération »! Rien de moins! Wow! Quand on relit, on réalise tout de même que le message n'est pas clair. Est-ce que Guy Laliberté prétend avoir exaucé le rêve d'une génération? Autrement dit, maintenant qu'un clown parti de rien s'est payé un rush d'adrénaline de 35 millions, nous pourrons tous enfin mourir satisfaits. Je sais que selon les riches, la richesse des riches apporte la richesse aux non-riches, mais de là à soutenir que le spectacle de leurs dépenses orgiaques nous apporterait aussi jouissance et contentement, il y a un petit pas sur la lune que je n'ai pas les moyens de me payer. Guy Laliberté se vanterait-il plutôt d'avoir accompli ce que toute une génération ne pourra jamais que rêver d'accomplir? Bravo Guy! Bravo! Merci de n'épargner aucun moyen pour nous le rappeler. Merci de supposer que les Terriens sont trop angéliques pour éprouver de l'envie et du ressentiment. J'aimerais aussi qu'on me dise de quelle génération Guy Laliberté aurait-il si héroïquement exaucé ou accompli le rêve. Parce que ma génération ne rêve pas de toucher le ciel. Ma génération est peut-être la première à vouloir vivre sur terre.

Vivre sur terre, vouloir vivre sur terre, c'est beaucoup moins facile qu'on pense. Je sais que des argumentateurs très subtils voudront me rétorquer : « Philippe, Philippe, Philippe…  Je sais que tu ne connais pas grand chose à la géographie et à l'astronomie, mais tu ne peux quand même pas ignorer que tout le monde vit sur la Terre. Tout Le MonDe. Ce n'est pas difficile, ce n'est même pas facile, c'est carrément inévitable ». Au contraire, mes amis, au contraire! Durant ma courte vie, j'ai surtout rencontré des gens qui ne vivaient pas sur terre, qui ne voulaient pas vivre sur terre. Des gens qui vivaient à l'intérieur d'une bulle, sur la Lune, en enfer ou dans un bungalow. Des gens qui voulaient vivre au sein d'une économie de marché, sur une autre planète, au Ciel ou dans un bungalow. (À ma famille et à mes amis banlieusards : je n'ai rien contre les bungalows, tant qu'ils ont des portes et des fenêtres…) Mais de plus en plus, je rencontre des gens qui vivent, qui veulent vivre autrement, sur terre. Peu importe leur âge, ces gens sont de ma génération.

Et que veut cette génération ? Que veut dire pour elle vivre sur terre? Ça veut dire vivre dans le même monde que tous les autres, le partager dans tous les sens du terme. Être présent à ce qui est devant nous, à ce qui nous entoure, à ce qui arrive. Refuser les tristes et fausses nécessités dans lesquelles on voudrait parfois nous faire vivre. S'imposer des limites dans un monde fini plutôt qu'aspirer à une croissance infinie dans un monde en ruines. Faire des rêves qu'on espère réellement réaliser et qu'on espère réaliser avec ses propres forces, sans forcer celles d'autrui. Ne rien attendre d'autre du ciel que du soleil, de la pluie et parfois quelques spectacles magnifiques. Je sais bien que Guy Laliberté et sa génération sont capables de comprendre tout cela. Enfin, une bonne partie de tout cela... Je sais que vue du ciel, la Terre est d'une beauté qui devrait nous la rendre précieuse. Que Toucher le ciel, c'est essayer de toucher tout le monde quant à la fragilité de la Terre. Mais il ne s'agit plus pour ma génération d'être sensibilisé à la Terre. Il s'agit d'y vivre, et pour y vivre, il faut aussi apprendre à voir les choses dans une perspective terrestre.

Sur terre, ce qui vu du ciel est insignifiant a tendance à paraître un peu plus gros, ce qui vu du ciel est sublime a tendance à paraître beaucoup moins joli. Sur terre, le ciel n'est souvent pas bleu, il est gris-smog, et il le devient malheureusement un peu plus chaque jour. Aussi bien intentionnée soit-elle, une fusée ne va pas changer cela. Sur terre, le magnifique chapelet qui la nuit illumine les continents, ce sont des lampadaires sur des autoroutes embouteillées, ce sont des enseignes nous invitant à consommer davantage, ce sont des foyers où l'on compte trop souvent jusque tard dans la nuit combien d'argent il nous reste. Aussi bien intentionnée soit-elle, une fusée ne va pas changer cela. Sur terre, la pauvreté, invisible depuis l'espace, invisible trop souvent même depuis un penthouse ou une maison sur le Mont-Royal, est très apparente. Et cette pauvreté n'a aucune leçon de sensibilité à recevoir de riches philanthropes qui ne vivent plus sur la même planète que nous. Quand ils pourront se payer des voitures hybrides ou des maisons hypermodernes, les pauvres prendront soin de la terre. En attendant, leur pauvreté demeure moins polluante que bien des richesses. Aussi bien intentionnée soit-elle, une fusée ne va pas changer cela.

vendredi 15 juin 2012

Le casseur

Les rebelles, les casseurs, les anarchistes, les têtes brûlées - voilà les gens qui enflamment notre imaginaire.

Richard Martineau

Bonjour. Je m'appelle Félix Légaré-Quesnel et je suis un casseur. Vous avez entendu parler de moi à la radio, vous m'avez vu dans les journaux et à la télévision. On ne peut pas me manquer, je suis un peu partout en ville ces temps-ci et je suis facile à reconnaître. J'ai les cheveux longs parce que je suis malpropre. Je porte des jeans et un kangourou noir parce que je n'aime pas travailler. Je porte un masque parce que je suis louche. Enfin je porte un carré rouge parce que je suis violent et intimidateur. D'autres signes me trahissent. J'ai toujours les poches pleines de balles de billard au cas-où, et je suis généralement en train de courir, au cas-où aussi. C'est essoufflant. Essayez de toujours courir quand tous les autres marchent pacifiquement. Heureusement qu'il n'y plus aucun manifestant pacifique aujourd'hui. Il y a quand même des choses qu'on ignore à mon sujet, que les médias ne rapportent jamais. Des choses qu'aucune image ne peut vraiment montrer. Comme l'appel à l'aide dans mon regard. Quand je casse une vitrine, c'est vrai que j'éprouve de la jouissance, car le désir d'anéantir la civilisation et d'intimider la majorité silencieuse est en moi plus fort que tout. Mais quand je casse une vitrine, je pleure aussi. Parce que je souhaiterais de tout cœur ne pas être un casseur. Parce que voyez-vous, comme tous les casseurs, je suis né ainsi.

mardi 12 juin 2012

La chute

Au premier jour l'homme se réveille seul. Était-il seul avant de s'endormir. Il ne s'en souvient plus. Pourquoi ne s'en souvient-il plus. Il est nu, il s'en rend compte. Pourtant il n'a jamais dormi nu. Il se sent regardé, mais il ignore comment, par qui, par quoi. Qu'est-il arrivé. Il n'arrive plus à se souvenir de la veille. Il n'arrive pas à ouvrir les yeux non plus, la lumière semble trop aveuglante. Il fait chaud, un peu trop chaud, et le côté gauche de son corps, sur lequel il a dormi, est moite et brûlant. Il essaie d'ouvrir les yeux, à peine un quart de seconde, mais une douleur éblouissante pénètre ses iris. Quelle est la sensation de deux poignards qui transperceraient le cerveau. Il le découvre. Il n'osera plus jamais ouvrir complètement les yeux. Il tente de se relever en s'appuyant sur le sol avec la paume de sa main gauche. La texture du sol lui rappelle du sable, un sable trop chaud et tranchant, un sable infiniment fin de diamants abrasifs, qui lui écorche la chair doucement, égratignant chacune de ses cellules, une fêlure infinitésimale à la fois. La paume de sa main gauche est déjà recouverte d'un mince film rouge, il le devine. Il n'arrivera pas à regarder, mais il faut qu'il essaie. Il place ses deux paumes sur son visage, les doigts remontent jusqu'au front, laissant une mince fente devant chaque œil, entre le majeur et l'annulaire de chaque main. Il entrouvre un œil, point minuscule au centre d'une croix de chair. Puis il le ferme et entrouvre l'autre. Puis l'un. Puis l'autre. Il ne peut faire autrement, la douleur est trop vive. Quelle est la sensation de deux longues aiguilles qui perforeraient le cerveau. Il le découvre. Il arrive au moins à entrevoir où il est. Une rivière de sable étincelant, qui descend et descend dans des méandres sans fins, à perte de vue. Cette rivière n'est nulle part. Tout est d'un noir absolu sauf la rivière elle-même, qui agresse son regard comme un soleil de soleils. Quand il n'en peut plus de regarder, quand il ferme les yeux enfin, il réalise que la rivière s'est imprimée pour de bon sur sa rétine, sur son cerveau, il ne cessera plus jamais de la voir. Où descend-elle, où va-t-elle. Quelque chose l'inquiète. Même quand son regard descend avec elle et s'éloigne infiniment, la rivière ne semble pas moins brillante. C'est impossible. Il veut poser sa main gauche un peu plus loin, mais elle rencontre le vide. Il doit être près du rivage. Il plonge à nouveau la main dans ce vide, un vide épais et presque présent, dont il sent la profondeur illimitée. Comment peut-on sentir cela, le vide. Il perd connaissance.

dimanche 10 juin 2012

Une division ? Quelle division ?


J'ignore si c'est parce que ça fait paraître plus intelligent de discuter des choses en cours comme si elles étaient déjà achevées, mais on parle souvent, on parle en fait presque depuis le début de l'impact durable de la crise étudiante sur le Québec.

L'impact serait d'abord politique. Souhaitons-le, mais rien n'est moins certain. On a dit avant la crise que le PQ allait marquer assez de points pour former le prochain gouvernement. Puis on a dit que la persévérance impopulaire du mouvement étudiant aiderait plutôt le PLQ à gagner les prochaines élections. On dit maintenant que Québec Solidaire et le PQ ne sont pas prêts à joindre leurs forces pour battre le PLQ. C'est connu, l'avenir change tous les jours. Ce qui est certain, c'est que Jean Charest ne perdra pas les prochaines élections sans que d'autres ne les gagnent. J'assume que vous comprenez un peu pourquoi, et ce que ça signifie.

L'impact serait aussi et surtout social. On parle continuellement de la division du Québec, qui serait désormais bipolaire et radicalisé. Partout régneraient méfiance et intolérance : entre la droite et la gauche, entre Québec et Montréal, entre les régions et la ville, entre les travailleurs et ceux qui sont payés à ne rien faire, qu'il s'agisse des étudiants, des enseignants ou des artistes. Pour résumer : entre le vrai-monde-ordinaire-contribuable-plein-de-bon-sens et tous les autres nuls. Il y a certainement moyen de prouver par de beaux sondages méthodologiquement rigoureux l'adhésion plus ou moins forte ou émotive au mouvement étudiant de telle ou telle fraction de la population, contre telle ou telle autre fraction de la population qui prendrait plutôt pour le gouvernement.

Il me semble pourtant qu'on passe ainsi à côté de l'essentiel. On fait de la politique un sport. On fait de la société québécoise un public partisan et rien de plus. Les Québécois ne sont pas de simples spectateurs de cette crise, qui n'est pas non plus une partie de hockey ayant viré accidentellement en bagarre générale, puis en émeute publique. Il n'y a pas deux équipes distinctes, disons les rouges de Looserville, division urbaine, et les verts de Fuckingrichtown, division régionale, qui s'affronteraient pour gagner une partie avec des joueurs plus ou moins talentueux et en santé, avec des spectateurs plus ou moins nombreux et volubiles. La conversation suivante n'aura jamais lieu.

Commentateur sportif compétent – Les rouges vont perdre, c'est certain : les joueurs sont moins payés, ils ont moins d'expérience, ils travaillent pas assez fort, ils donnent pas leur 110% en troisième période, ils ont trois entraîneurs qui les dirigent tout croches, ils jouent pas dans leur aréna, l'arbitre est contre eux, le public aussi est contre eux.
Commentateur sportif étrange – Les rouges vont gagner parce qu'ils ont raison, parce que leur cause est juste, parce qu'ils ne veulent rien moins que réinventer le hockey.
Public non sans raison décontenancé – Whadefuck???

Expliquer la vie sociale et politique comme s'il s'agissait d'un sport, c'est à dire en termes de victoire et de défaite, et le faire en fonction des caractéristiques « objectives » des « joueurs » et des « spectateurs », que ces caractéristiques soient démographiques, économiques ou socioculturelles, ne nous aide pas à mieux comprendre ni à mieux participer à cette vie sociale et politique. La politique ne ressemblera à une partie de hockey que lorsque les joueurs pourront déterminer par leur jeu sur la glace non seulement le score, mais la durée de la partie, les dimensions de la patinoire, le nombre de joueurs par équipe, les règles elles-mêmes. La société ne ressemblera à un public de hockey que lorsque les spectateurs, au centre Bell comme à la maison, pourront intervenir sur la partie autrement que par leurs cris. Vaut mieux attendre que Québec ait son équipe, mais je ne veux pas paraître partisan...

Si l'on tenait absolument à résumer le conflit étudiant en termes sportifs, il faudrait plutôt s'y prendre ainsi :


         Ils étaient quatre qui voulaient se battre
         Contre trois qui ne voulaient pas
         Et les quatre qui voulaient se battre
         Dirent au trois qui ne voulaient pas
         Nous sommes quatre qui voulons nous battre
         Contre trois qui ne veulent pas

Ceux qui ont accusé Passe-Partout de dorloter avec des tout-le-monde-il-est-gentil l'amour-propre hypertrophié d'enfants-rois ont manqué quelques épisodes. Je ne me suis toujours pas remis de cette comptine aussi brutalement cynique. Toujours est-il que réduire la division des Québécois à une lutte déterminée par les seuls critères démographiques, économiques ou socio-culturels, c'est donner une victoire beaucoup trop facile aux quatre qui voudraient se battre. Il n'est pas certain que les quatre sauront unir leurs forces et ne se battront pas plutôt les uns les autres. Il n'est pas non plus certain que les trois ne sauront pas se défendre malgré leur refus de se battre. Il n'est pas certain qu'après quelques coups, l'un des quatre ne décidera pas finalement qu'il ne veut plus se battre. Enfin il n'est pas certain que les trois ne vivront pas plus longtemps que les quatre. Rien n'est certain, mais il arrive parfois qu'on en sache trop et qu'on l'oublie. 


Ce que nous rappelle la comptine de Passe-Partout, c'est qu'il n'y a qu'une seule division qui compte. Il n'y a qu'une seule division qui nous permette de comprendre la situation actuelle tout en y participant, et cette division a pour sujet la division elle-même. C'est une MÉTA-division!!! Elle partage ceux qui contribuent, volontairement ou non, au maintien et au renforcement de cette division, et ceux qui entendent la réduire, l'abolir. D'un côté on veut la division, on veut la réussite des uns et l'échec des autres, on veut le mépris des premiers et le ressentiment des derniers. De l'autre côté on souhaite la participation, on souhaite la réussite de tous sans laquelle l'échec est celui de chacun, on souhaite l'amour des autres, qui est aussi parfois colère contre ceux qui veulent les écraser. Entre ces deux côtés, ce n'est pas une partie qui se joue, mais l'histoire, celle qu'on crée en agissant avec les autres. La division peut remporter autant de parties qu'elle veut, l'histoire appartient quand même à ceux qui y participent.

lundi 4 juin 2012

Richard Martineau sait-il ce qu'il fait ?

Rien de plus difficile que de réfléchir par soi-même. Nos pensées sont tissées maladroitement de celles des autres, notre seule originalité ne consistant bien souvent qu'en quelques fils qui dépassent. Usé par la contradiction, la confusion et l'erreur, ce tissu mal raccommodé est presque partout trop déchiré pour recouvrir convenablement la moindre des réalités. Et pour les réalités non moindres, la déchirure est un abîme. Heureux qui n'a jamais conçu dans un regrettable moment d'extase que les atomes étaient des systèmes solaires, composés de minuscules planètes à la surfaces desquelles vivaient d'autres créatures, elles-même faites d'atomes semblables à de minuscules systèmes solaires! Le vertige de l'infini ne nous fait pas toujours tomber de haut... Mais l'erreur est humaine, on apprend et on recommence.

Allez savoir pourquoi, tout cela m'amène à penser à Richard Martineau. Parce qu'il se contredit lui-même, parce qu'il est très confus, parce qu'il se trompe souvent, il pourrait être tentant de le considérer comme un simple dilettante intellectuel, comme nous tous donc, non moins perdu que nous tous. Nous l'avons dit, rien de plus difficile que de penser par soi-même. Richard Martineau ne saurait faire exception. En cela, il est comme tout un chacun infiniment respectable. Membre à peine plus remarquable que les autres de cette bande de milliards de hardis aventuriers de la pensée vivante, de la pensée qui se fait dans l'aveuglante proximité du présent, Richard Martineau serait la pointe toujours obtue et s'aiguisant sans cesse d'une humanité privée de moyens et cherchant obstinément à se les donner. Mérite-t-il alors tout notre respect ?

En effet, il faut dire que Richard Martineau n'a pas peur de se contredire lui-même. Pas plus tôt que ce matin, il a posé deux diagnostics psychologiques d'une lucidité dévastatrice sur cette jeunesse québécoise qui persiste à manifester contre toute raison. Le premier d'abord. Selon un ami de Martineau, les jeunes seraient comme sous l'effet d'une drogue : « Ils se sentent importants, désirés, affublés d’éloges et ivres de désobéissance civile ». Le second ? L'opposition des jeunes au gouvernement serait celle d'un « fils révolté qui se sent abandonné, mal aimé, mal compris ». J'ignore si l'ami de Richard Martineau est un psychologue, mais je sais que Richard Martineau ne l'est pas et je le félicite de ne pas s'en être remis à un véritable spécialiste, d'avoir tenté de penser par lui-même. Le résultat est stupéfiant! Pour résumer avec un brin de mauvaise foi, les jeunes se sentiraient importants, abandonnés, désirés, mal aimés, affublés d'éloges et mal compris. Si j'étais la population québécoise, je demeurerais pantoite de confusion!

Richard Martineau est en effet lui aussi très confus. Pas plus tôt qu'hier, il lui a fallu clarifier ses propos de la veille dans une courte et pédagogique Mise au point pour ceux qui ne savent pas lire : « je n'ai jamais dit que les manifestants étaient des tueurs ! J'ai dit qu'on vit dans un monde d'extrême et que l'extrême est partout : dans le sport, le sexe, les faits divers, les manifs, les médias, la politique, la bouffe... ». Qui trop embrasse mal étreint ? Je vous invite à vérifier si vous savez lire en examinant le texte en question. Richard Martineau ne dit jamais que les manifestants sont des tueurs. Il nous parle d'abord de la réhabilitation médiatique et sociale d'Issei Sagawa, un cannibale psychopathe. Il nous parle ensuite du culte contemporain de la transgression selon Jean-Jacques Pelletier dans son essai Les Taupes frénétiques. Il nous parle enfin des manifestants casseurs comme expression la plus actuelle de ce culte, nous laissant sur cette question énigmatique : « ça ne vous rappelle pas quelque chose ? ». Je ne comprends pas la question. Sincèrement, j'ai beau relire, je ne la comprends pas. Mais si je voulais à tout prix la comprendre, qui sait ce que je pourrais faire dire au texte ? Je me tromperais sûrement...

Et comme moi, Richard Martineau se trompe souvent en effet. Pas plus tôt qu'avant-hier, il a tenu à féliciter de vrais jeunes bâtisseurs du Québec, l'entreprise de pub, de marketing, de design et d'architecture Sid Lee. Chez Sid Lee, on se lève tôt le matin et on travaille fort toute la journée, parce qu'on est ambitieux. Chez Sid Lee, on est actif, créatif et proactif. Chez Sid Lee, on revitalise Montréal, le Québec, le monde, le système solaire! Ce lyrisme n'est pas le mien, mais celui de Martineau. Je suis tout de même prêt à le croire sur parole et ne suis certainement pas là pour démolir la réputation de ces jeunes entrepreneurs qui doivent éprouver le plus vif bonheur à ne pas savoir complètement où ils s'en vont. Là où Richard Martineau se trompe, c'est quand il dit ceci : « Certaines personnes voient des personnes comme ça, et ont le goût de vomir. » De qui parle-t-il donc ? Qui a le goût de vomir ? Ou quand il dit ceci : « Ces gens-là ne se réunissent pas pour saborder le grand prix. » Les manifestants non plus, il suffit de les écouter pour s'en convaincre. Ou quand il dit : « Ils ne veulent pas mettre Montréal "sur la mappe" en fracassant des vitrines, en lançant des roches et en mettant le feu, mais en montrant que le Québec est un formidable lieu de création CONSTRUCTIVE. » Mais c'est exactement ce que veulent les manifestants, seulement ils le veulent pour toutes les Québécoises et tous les Québécois !

Il pourrait être tentant de considérer Richard Martineau comme un simple dilettante intellectuel, en cela infiniment respectable. Comme tout un chacun, il peut en effet être confus, se contredire, faire des erreurs. Comme n'importe qui, il lit un peu de tout, citant à gauche comme à droite sans maîtriser ses sources. Comme n'importe qui, il mélange souvent les faits et les valeurs et peut se laisser berner par une analogie bien faite. Sauf que Richard Martineau est payé pour faire tout cela. Mieux payé que les étudiants et leurs enseignants. Mieux payé que tous ceux qu'il entend convaincre de se soumettre amoureusement à une austérité budgétaire qui n'a rien d'une responsabilité budgétaire. À chaque fois qu'il se contredit ou qu'il est confus, c'est pour mieux nous manipuler, et alors il gagne un peu plus. Quand il se trompe, c'est pour mieux nous tromper, et alors il gagne encore un peu plus. Ce qu'il fait, en effet, il ne le fait jamais qu'en effet, et il sait très bien ce qu'il fait. Richard Martineau n'est pas un amateur.